|
|
Les romains trouvèrent en Gaule un complexe de sources minérales d'une
grande richesse65. De leur goût particulier pour les bains publics - véritables lieux de
vie politique- associé à la ferveur des indigènes pour les sources, naquît le thermalisme,
qui rapidement prit rang d'institution. Il devint tout à fait naturel d'aller prendre les
eaux aux fontaines miraculeuses pour entretenir la santé, tout en participant à la vie
civique aux bains qui les jouxtaient.
Cependant, le thermalisme n'est qu'un aspect de la dévotion thermale, la plupart
des sources isolées dans les campagnes et servaient uniquement à la dévotion des
habitants des villages environnant. C'est contre cette implantation au plus près des
fidèles que l'Eglise dut lutter.
Le christianisme dispose de sa propre liturgie de l'eau, constitutive du premier
sacrement: le baptême, qui célèbre par l'eau l'immersion dans le corps de la chrétienté.
Cependant, il s'agit-là d'une institution par trop sommaire qui n'épuise pas la dévotion
que ressentent les fidèles pour l'eau.
Il fallu ainsi essayer de dériver la ferveur pour l'eau de source sous peine de se
faire déborder. Des églises furent construites à proximité des lieux de culte pour
détourner les fidèles de l'objet de leur piété. L'échec fut cinglant, l'église n'étant guère
utilisée que le temps d'une prière du pèlerin pour célébrer l'accomplissement de la
dernière étape, juste avant de se rendre à l'eau toute proche.
On assista alors à une inflation du sacré, l'Eglise décidant de se donner les
moyens de résister en faisant déplacer des reliques pour les exposer dans les nefs des
chapelles de dérivation, ce qui ne fit que grossir le flux des adeptes de la source du
nombre des pèlerins de la relique, en quête d'une sacralité d'absorption plus matérielle
qu'une simple exhibition d'ossements.
Il fallut alors se rendre à l'évidence, le syncrétisme des foules avait depuis
longtemps amalgamé ces différentes manifestations du sacré, il ne s'agissait plus pour
l'autorité ecclésiastique que de s'en assurer le contrôle en les inscrivant dans la liturgie
chrétienne.
|
|