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§1 De l'exclusion de l'anthropophagie

La théorie psychanalytique; propose l'existence d'une loi originelle qui structure la formation de la personne par une prohibition alimentaire. Pour être plus précis, il faut ici distinguer entre les deux ordres comminatoires qui pèsent sur l'existence de l'enfant.

Ainsi, il existe deux événements qui structurent l'individu et qui sont autant d'enseignements. Le premier l'édifie sur les impératifsde la physis: : il lui faut respirer, quant bien même il en éprouverait la sensation que ses poumons se déchirent. C'est la première réalité qui s'impose au nourrisson: dès le moment de sa naissance, il subit un choc respiratoire.

Cette expérience l'érige dans l'univers des vivants: d'abord dans l'univers de la médecine, comme un individu "sain" car ayant crié; et par là dans l'univers du droit8

comme une "personne" car ayant donné le premier gage qu'il est vivant et viable; dans l'univers religieux, comme "Homme" car ayant reçu ce souffle qui n'est autre que l'âme; dans l'univers de l'analyse enfin, comme "traumatisé".

Plusieurs mois plus tard, l'enfant se trouve confronté au nomos tout aussi redoutable, et à son premier commandement: "tu ne mangeras pas ta mère". De la genèse de cette injonction, la psychanalyse nous enseigne que lorsque l'enfant éprouve la sensation de faim, il fantasme une mère terrible qui veut le dévorer et le mettre en morceaux. Il projette ainsi sur elle sa propre faim, sa propre soif et surtout ses douloureuses crampes d'estomac qui signent les appétits urgents de son ventre et qui sont en eux-mêmes comme une dévoration.

Ainsi, ce n'est pas lui qui est affamé, c'est elle. Manger ou être mangé, voilà l'angoisse dévorante qui trouble la bouillie de bébé, avant que celui-ci, repu, ne s'assoupisse dans les bras de sa mère. Ce n'est que l'expérience renouvelée qui réussit à transformer la sensation de faim, d'un traumatisme en une promesse de satisfaction.

L'expérience digestive n'est définitivement sécurisée qu'avec l'apparition de ce "tabou cannibalique" sur sa mère. Il apparaît au moment de la poussée dentaire, lorsque l'enfant est considéré comme entrant dans la "phase orale". Il s'agit de la période qui suit celle de succion du sein maternel, lorsque la poussée dentaire l'engage à mordre sa

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