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mythologies et celles qui reposent indirectement sur l'anthropophagiesont innombrables.

Si l'anthropophage est, suivant la société qui sert de référent, soit un animal, soit un monstre, un malade mental, un barbare ou un primitif, il est toujours celui qui se situe totalement en-dehors de la culture. Il ignore absolument les règles les plus élémentaires en vivant dans la promiscuité, en pratiquant l'inceste et en s'abandonnant sans frein à tous les excès de sa nature déréglée. Bref, il représente toujours la plus parfaite incarnation de l' hubris. Et c'est une constante que la caractérisation par l'anthropophagie de tous les dérèglements affectant l'individu.

§ 2. De la nécessité du cannibalisme;

L'anthropophagie est inconcevable;.Elle est plus qu'une simple crainte, avec elle ouvre une béance; il est donc logique qu'elle suscite des réactions de rejet absolu. Elle est l'acte le plus ignoble: ignoble par nature, irréductible à la culture, annihilateur de toute dignité; et ce quelles que soient les époques, les sociétés, les lieux. Au point que même reléguée dans l'univers de la mythologie, ou dans celui de l'étranger, elle pétrifie encore. Prenons deux exemples.

D'abord la matière a donné lieu à ce qui a pu être qualifié de "révisionnisme forcené"10. Les témoignages révélant des pratiques anthropophages ne seraient, selon cette conception, que le fruit d'un phénomène de transfert: celui d'un observateur occidental, d'autant plus névrosé qu'il fut conquistador, humaniste ou ethnologue, qui rejette sur les cultures indigènes du Nouveau Monde ses propres fantasmes de dévoration.

S'il est possible de supposer que le succès de cette polémique11n'est peut-être pas étranger à certaines intentions publicitaires, il faut tout de même relever qu'il s'agit d'un courant qui s'inscrit dans une tendance à l'incrédulité qui remonte à la confrontation de l'occident chrétien à d'autres civilisations, donc dés la Renaissance, pour constituer, avec d'autres, un des éléments du "mythe du bon sauvage".

Ensuite, moins spectaculaire mais sans doute plus révélateur encore, il y a l'extension considérable de la notion de cannibalisme. Si le cannibalisme, en tant

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10;F. LESTRINGANT: Le cannibale, grandeur et décadencePerrin, Paris 1994,p 31 11L'initiateur en fut W. ARRENS:: The man-eating myth. Anthropology and anthropophagy,cité par F. LESTRINGANTibid.

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