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de la Justice, du ministre de l'Agriculture et du ministre du Commerce et de
l'Industrie. En fait, un Service central de la Répression des Fraudes a été créé par
décret le 24 avril 1907 au sein du ministère de l'Agriculture. La procédure policière
utilisée par ces services consistait principalement en prélèvements d'échantillons
que faisaient des agents nommés par le Préfet parmi des gens rompus à ces
pratiques (commissaires de police, agents des contributions indirectes et des
douanes, inspecteurs des halles, agents des octrois, vétérinaires sanitaires etc, et
même parfois des membres des syndicats professionnels sous conditions
garantissant leur impartialité, régies par la circulaire du ministre de l'Agriculture du
23 décembre 1907). Ces agents n'étaient pas assermentés et n'avaient de compte à
rendre qu'aux préfets qui, seuls, pouvaient leur donner des ordres. Face à cette
procédure inquisitoriale : l'établissement compensateur de l'expertise contradictoire,
permise à tout inculpé. Notons qu'on pouvait être inculpé avant de savoir si le
produit suspecté était véritablement délictueux car cela est significatif de l'esprit
drastique de la loi.

Aboutissement d'un siècle de tentatives pour rétablir le profond déséquilibre
que la liberté d'entreprise révolutionnaire avait favorisé, la loi innovait aussi en
permettant aux producteurs et commerçants de bonne foi, de "s'entendre avec les
techniciens pour formuler la définition de l'aliment commercialement pur et dresser
la liste des pratiques loyales nécessaires à sa préparation"
360.

La genèse des structures scientifiques de la police alimentaire, on le voit, va au
pas de l'acception de la chimie et sa spécialisation s'alourdit de la collaboration
économiquement conséquente de ceux qui, dès l'origine, lui faisaient
pragmatiquement concurrence : "Dans les mêmes conditions (sans laboratoire et
sans réactifs) un négociant, un industriel, un fournisseur sans instruction
technique, mais ayant l'expérience du métier, est capable de porter un jugement
sommaire, approximatif sur les denrées qui lui sont présentées ; le médecin, lui,
sera complètement désarmé s'il ne connait que les procédés de laboratoire."
361
C'est que devant la complexité, les empiriques ont encore de beaux jours ! Ils ne
serviront pas que de dégrossisseurs et profiteront de l'occasion pour contrôler les
experts cependant que de toute cette fébrile et chaotique activité ne sortira que fort
peu de répression judiciaire.

  1. Les lois du paradis


L'importance et la diversité des travaux et des débats qui ont précédé et suivi
l'élaboration de la loi de 1905 sur la répression des fraudes n'étaient que
l'épiphénomène d'une mobilisation générale de l'opinion. C'est que les choses
avaient bien changé depuis 1883 quand Duclaux écrivait : "Nos concitoyens ont
appris sans étonnement et sans frayeur qu'on mettait de la strychnine dans la bière,
de la litharge dans le vin, du suif dans le beurre , du plâtre dans la farine , du cuivre
dans le pain, du plomb dans les crevettes et de l'arsenic dans les conserves
alimentaires."
362


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360Dr. P. REILLE, "2ème congrès international pour la répression des fraudes", HPML,XIII,
(1910), p. 442.
361E. VALLIN, à propos du Traité des falsificationset et altérations des substances
alimentaires et des boissons de E. BURCKER in "Bibliographie", RHPS, XIV, (1892), p. 195.
C'est nous qui incluons la parenthèse.
362V. du CLAUX, "Le monde des fraudeurs", HPML, IX, (1883), p. 8 et 9.

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