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seaux aménagés 59. Il s'agissait de diminuer les probabilités d'infection des
blessures et de lutter contre la vermine. "Si l'on penseque le pou est l'agent
propagateur du typhus, nous dit Binet, on conçoit que le médecin ne saurait porter
trop d'attention à cette question"
60et bien que tous ne soient pas encore
absolument convaincus, la lutte fut intense et organisée au mieux des moyens et des
circonstances.

La guerre a beau être le but ultime pour lequel on fabrique de l'homme
spécialisé, jamais sa préparation ne prévoit suffisamment l'ampleur de son pouvoir
destructif et d'épisode en épisode, le travail est à repenser. Toutefois, comme pour
le recrutement, certaines bases sont conservées et font l'objet de soins amplifiés.


Taillés dans le vif


Au cours du XIXème siècle, le vocabulaire français s'enrichit d'un sens
nouveau pour le mot condition.Les légendaires boxeurs anglais, qui défrayaient la
chronique depuis le XVIIIème siècle, étaient alors l'objet de l'attention des
hygiénistes qui y voyaient des hommes de fer, dont les combats affichaient la
quasi-indestructibilité. Or "Si ces hommes se sont fait, pour ainsi dire, un nouveau
corps et de nouveaux organes, c'est par les préparations qu'ils ont subies, par
l'éducation spéciale qu'ils ont reçue, par l'entraînement, la condition, pour parler
leur langage ordinaire, c'est-à-dire par le régime"
61.

Ce qu'on entendait alors par régime était : l'alimentation, les conditions
atmosphériques, l'exercice, la génération et les influences morales. On verra là une
bonne part du territoire que l'hygiène cultivait. Cependant, la mesure de l'influence
que pouvait avoir le régime sur la fabrication humainement conduite des formes
vivantes avait été menée, non par des scientifiques, mais par des hommes de la
campagne : "La pratique agricole, l'élève des bestiaux, l'éducation des animaux
domestiques, ont amassé, pendant des siècles, des trésors d'observations positives
et d'expériences toutes faites. Le moindre fermier de nos campagnes possède des
notions qui nous manquent, mélange bizarre de vérités et d'erreurs, produit brut
d'un empirisme souvent grossier, mais quelquefois inspiré par le génie"
62.

L'ouvrage ancien de l'homme sur les végétaux par la variation des
amendements, la taille, les hybridations, les greffes, avait tout naturellement été
suivi de tentatives similaires sur le règne animal. Et de l'observation des insectes,
des parties perdues puis régénérées des vers de terre, des monstruosités
provoquées chez les batraciens (Edwards), l'incessante expérimentation sur les
animaux domestiques prenait élan et leçon. Au XVIIIème siècle, Bakewell, un
simple fermier anglais, avait créé des races de boeufs, de chevaux et de moutons
incomparables, qui réunissaient toutes les qualités désirées par l'homme pour ces
animaux (parties plus charnues pour la boucherie, absence de cornes, force, finesse
de laine, etc.). "Vantez-vous maintenant, s'écria un écrivain anglais, les Michel-
Ange et tous ces statuaires qui façonnent la pierre et le bronze. N'est-ce pas aussi
un grand statuaire, un merveilleux artiste, ce Bakewell, qui sculpte la vie, qui

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59Dr. L. BINET (médecin aide-major, interne des hôpitaux de Paris), "Procédés pratiques
permettant d'assurer la propreté du corps et des vêtements dans les régiments du front", HPML,
XXIV, (1915), p. 200.
60Id., p. 206.
61ROYER-COLLARD, "Organoplastie hygiénique, ou essai d'hygiène comparée, sur les moyens
de modifier artificiellement les formes vivantes par le régime", Mémoire lu à l'Académie de
médecine le 6 décembre 1843, HPML, XXIX, (1843), p. 222.
62Id., p. 213.

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