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militaire, le docteur Morache 22, établissent que de 1831 à 1843, la moyenne des
exemptés pour inaptitude physique et défaut de taille était de 38,58 %. De 1844 à
1868 elle passa à 32,6 % puis dans la période faste d'après 1872 : 13,5%, soit
presque un tiers de ce qu'elle était sous la Monarchie de Juillet.

A partir de 1872, le pays entier se prit de passion pour la santé du soldat :
"Au sentiment patriotique se mêle une légère nuance de sentiment moins
désintéressé. Tous les pères qui savent que leurs fils doivent le service personnel
ont en effet, une propension bien légitime à applaudir aux progrès de l'hygiène du
soldat (...) Cette sollicitude pour le soldat paraît même à quelques esprits chagrins
beaucoup exagérée, ils déplorent ce qu'ils appellent la paternité à outrance, ils
voient avec déplaisir l'opinion publique s'émouvoir au moindre article de journal
s'immisçant aux choses militaires, ils redoutent les dénonciations de la presse,
exactes ou erronées ; ils prétendent que la discipline est incompatible avec la
nouvelle tendance des esprits, que l'armée n'est pas en définitive une institution
philanthropique et qu'elle sera tuée par le souci de conserver la santé."
23

Les découvertes de la science pastorienne firent à juste titre redouter la
promiscuité de la caserne et les traités d'hygiène militaire, comme les articles des
revues médicales, se multiplièrent en proportion de cette inquiétude. Dès 1894, une
circulaire ministérielle (13 mars) tâche de préciser dans le détail ce qui peut être
concilié entre les exigences d'une armée préparant la revanche et les progrès de la
science. Les services auxiliaires, maintenus, récupéraient suffisamment les hommes
fragiles et adaptaient les activités à leur inaptitude. Il s'agissait surtout, dans la
catégorie hétéroclite des faibles de constitution, d'éviter aux candidats à la
tuberculose de s'y précipiter par épuisement.

En 1908, une visite parlementaire dans une place forte de l'Est constata la
présence de troupiers de 50 kg. Aussitôt, une circulaire ministérielle, à la mesure de
l'émotion, fit désormais prendre en compte le poids qui, s'il était trop faible,
provoquait la réforme temporaire. On n'a jamais réformé définitivement pour poids
insuffisant car c'eût été un moyen d'échapper au service trop facile pour certains.
Mais dans les conseils de révision, le gendarme préposé à la toise se mit à peser les
corps pour mieux juger de leur destin.

On peut voir dans le tableau suivant 24, qui concerne la période de 1831 à
1842, les causes d'exemption qui avaient alors cours et notamment le grand nombre
d'infirmes. Remarquons au passage, le sort peu charitable fait à la famille de ceux
qui remplaçaient.


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22MORACHE, Traité d'hygiène militaire, 1ère édition, Paris, (1874), p. 233.
23BURLUREAUX (professeur agrégé d'hygiène au Val de grâce, médecin major de 2ème classe),
"La vie de soldat en temps de paix", HPML, XXIII, (1890), p. 123.
24BOUDIN,"Etudes sur le recrutement de l'armée", ibid., p. 293.

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