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; il est sacrifié, dépecé, ses os sont broyés et mangés

; son coeur et son foie sont réservés à Pobéguin sur

sa demande."
1

Ici, l'escamotage judiciaire de l'anthropophagie avait

utilisé la logique du soupçon, de l'enquête, de la

condamnation et de l'exécution, bref, de tous les rites qui

distinguent le droit pénal de la barbarie. La justice peut

obtenir le même résultat par la technique inverse : en

refusant de concevoir l'anthropophagie autrement que

comme un acte de folie, elle s'oppose à ce qu'un procès

remette en cause l'une des bases de la civilisation

occidentale, naïvement présentée comme ce qui exprime au

mieux l'idée d'humanité. Je pense ici à l'affaire, désormais

célèbre puisqu'elle a attiré l'attention tant des juristes que

des psychanalystes, de cette mère de Sélestat qui, poussée

par la faim, avait en 1817 tué son enfant pour le manger : la

médecine et la justice s'étaient accordées sur ce que,

malgré l'absence de symptômes de l'aliénation mentale, la

mère anthropophage devait être déclarée folle pour

"l'honneur de l'humanité"
2. La folie peut désormais remplir


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1Zaborowski, La Grande encyclopédie, vº "Anthropophagie"

2Marc C., "Examen médico-légal d'un cas extraordinaire d'infanticide par

le docteur Reisseissen de Strasbourg", p. 379-411. Sur cette affaire :


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